Bien organiser sa session de mixage

Afin de pouvoir anticiper correctement sa session de mixage, il est important de s’organiser. Les bonnes habitudes doivent se prendre dès le départ pour éviter les galères.

Qui ne s’est jamais retrouvé avec une superbe idée dans la tête tout en s’apercevant qu’un coup de caisse claire était mal calé ? Nous nous précipitons alors pour faire rentrer dans le rang le fauteur de troubles. Pendant ce temps, l’inspiration du siècle qui s’ennuyait toute seule nous file entre les doigts. Afin d’éviter un tel gâchis, nous vous proposons aujourd’hui quelques petits conseils. Ils vous aideront à entamer vos sessions de mixage sous les meilleurs auspices.

Pourquoi bien organiser sa session de mixage

  1. Ne pas se mélanger les pinceaux, le mix est déjà une opération assez compliquée, il s’agit d’être organisé et précis, sans quoi vous allez vous perdre et probablement abandonner.
  2. Gagner du temps, le mix est une opération longue, surtout quand on débute. Tout ce qui pourra vous aidez à gagner du temps et à fluidifier votre manière de travailler sera bienvenu !
  3. Exploiter plus de possibilités lors de la phase de mixage. Mieux ranger, c’est mieux exploiter les possibilités qu’offre un logiciel donné. Si c’est le bazar dans votre session, il y a fort à parier que vous aurez du mal à calibrer certains effets.
  4. Partager son projet, il doit être compréhensible et modifiable par n’importe quel autre Sound Designer, ingénieur du son ou encore producteur. Ayez donc bien cette vision des choses car c’est une vision de la production musicale très professionnelle. Votre mixage héritera de la qualité d’organisation de votre projet.

Organisation

Voir plus pour mieux entendre

Ne vous êtes-vous jamais dit que rien ne ressemble plus à une fenêtre de logiciel audio qu’un score d’orchestre ? Vous savez cette immense partition qui se lit aussi bien verticalement qu’horizontalement et dont le chef d’orchestre a besoin pour se repérer dans l’œuvre puisqu’elle reprend l’ensemble des instruments dans un déroulement chronologique.

Que penseriez-vous d’une telle partition dans laquelle les lignes mélodiques, les bois par exemple, se trouveraient situées sous les percussions ou les contrebasses ? Les pupitres de cordes disséminés aux quatre points cardinaux et où les repères temporels ne seraient pas clairement établis ? Euh… où est-ce qu’on reprend le refrain, déjà ?

Non ! La matière que vous allez traiter doit vous apparaître clairement, structurée, et doit être compréhensible sans effort. Si votre écran est petit, il faut qu’en un clic vous soyez à même de déployer ou replier les pistes d’une même famille. Leur visualisation d’ensemble suffit à vous situer dans le défilement du projet mais vous devez également pouvoir aller chercher les détails d’une mesure de caisse claire si vous en avez besoin ! Pensez donc à enregistrer des niveaux de zoom accessibles afin de « switcher » très rapidement d’une vue d’ensemble à une piste unique, par exemple. Si vos écrans sont larges et multiples, offrez-vous le luxe de garder votre console virtuelle ouverte alors que l’arrangement défile bien sagement sur une autre page. Encore mieux, si quelques plug-ins majeurs restent visibles vous pourrez les ajuster à tout moment… Les réglages d’une reverb principale seront ainsi optimisés facilement alors que le mix progresse.

Modèles types/ Templates

Lorsque vous importez vos régions audio, la méthode la plus efficace est, sans aucun doute, de disposer de projets types (templates). On peut par exemple avoir une collection de « templates » disponibles pour la prise de voix, les mixes purement numériques, d’autres pour le mastering… A vous de définir la variété de cas rencontrés et d’en déduire le dispositif et les options qui vous seront nécessaires. C’est une étape un peu laborieuse. Mais le fait de prendre le temps de créer vos templates et votre propre méthode de travail vous aidera pour les mix futurs.

Tempo

Une fois le projet type choisi, il vous restera simplement à ajuster tempo et signature. Comme à positionner votre début de morceau à la 5e ou 9e mesure, (il n’est jamais inutile de réserver un espace pour l’essai d’une intro, un décompte ou autre) et d’enclencher un métronome pour vérifier que tout cela sonne « en place » et « à l’endroit ». Une indication de tempo, même approximative n’est toutefois jamais superflue… le calage d’un délai ou même d’une reverb s’en trouvent facilités.

Importation

La première chose à faire est de nommer de façon brève mais explicite chacune de vos pistes. Il faut ensuite les agencer logiquement. Lors de l’importation de vos pistes, votre logiciel vous donne généralement le choix. Que ce soit entre une disposition linéaire des régions (toutes se suivent sur une même piste), ou un import multipiste, où elles se répartissent sur les pistes disponibles à partir d’un point de départ unique. C’est la 2e option que vous choisirez en général. Vous vous apercevrez alors que si elles n’ont pas été soigneusement numérotées par leur auteur (attention à bien observer un nombre à 2 digits sous peine de découvrir que la 10 suit la 1), elles vont s’être classées par ordre alphabétique et qu’il ne s’agit pas obligatoirement du cas de figure le plus logique… imaginez : Accordéon, Basse, Castagnettes, Doudouk, Electric guitar, etc…
Quoi qu’il en soit il faudra probablement procéder à un reclassement rapide et quoi de mieux pour vous aider que les couleurs !

Couleurs

Les couleurs – tant dans la fenêtre arrangeur que sur la console virtuelle – vont vous venir en aide et il n’est pas indispensable de faire preuve d’une imagination débordante pour penser à regrouper une batterie, à ne pas trop éloigner percussions, basse et guitares rythmiques afin de disposer d’une section rythmique cohérente et simple à travailler. Si vous le pouvez, regroupez les prises par couples, (piano, over-head de batterie, ambiances ou même synthés), dans des pistes stéréo. Les réglages uniques vous simplifieront la vie et l’affichage en sera compacté sans perte de lisibilité.

Dans ce même esprit, certains logiciels proposent des dossiers de pistes. Ils vous permettent de déployer ou regrouper (parfois même avec de dégradés de couleurs pour une meilleur lisibilité) toutes les pistes individuelles d’une section de cuivres, de cordes ou une batterie… Ils les colorisent tous de manière identique. En autorisant même parfois des commandes simples et groupées comme le «mute » ou le « solo ».

Bus sous-groupes et bus auxiliaires

Si la table de mixage est une autoroute, les signaux en sont les véhicules et les bus, eux, en sont les files. Dans une console physique ou virtuelle, un bus collecte l’ensemble des données de même nature qui sont destinées à être envoyées ou traitées simultanément par un même réglage ou module.
Ainsi, un bus auxiliaire est un bus de mélange dans lequel on prélève ou pas une partie du signal issu des différentes pistes afin d’être traité par un effet… reverb ou délai par exemple. Cet effet, réglé à 100% (Wet) est à son tour réintroduit dans le mixage final. Vous pouvez d’ores et déjà créer un certain nombre de bus auxiliaires. J’ai pour ma part l’habitude de travailler avec au moins deux réverbes, un delay, une compression parallèle. Et un effet de modulation alors pourquoi attendre d’en avoir besoin ?
Les bus sous-groupes, eux, permettent un traitement commun tel qu’une égalisation ou une compression d’ensemble. Par exemple, un bus « batterie » rassemblera tout ce qui concerne cet instrument (caisse claire, grosse caisse, cymbales, charley etc…). Il aide à la fois à la lisibilité et au mixage.

Editing & Co

Il convient maintenant de mettre en forme la matière sonore à proprement parler. Tout d’abord, sélectionnez les meilleures prises si ce n’est pas déjà fait. Au besoin, corrigez les fausses notes avec les outils à votre disposition (assemblage de plusieurs prises ou Melodyne etc.). C’est également le moment de s’attaquer aux éventuelles erreurs rythmiques à grand coup de quantification ou au pire à la main.
Prenez ensuite le temps de nettoyer consciencieusement vos pistes. Qu’il s’agisse de réduire les bruits de bouche et autres respirations du chanteur. Ou encore de supprimer le buzz d’une guitare, de couper le précompte du batteur, de clics, de hum, ou autre. Tout doit y passer sous peine de perdre de précieuses minutes au mixage à la recherche de ce petit truc qui agace tant vos oreilles.
N’oubliez pas non plus de jeter un œil aux problèmes de phases pour les instruments enregistrés avec plusieurs micros !

D’autre part, si vous ne devez plus y toucher, pensez à faire un rendu audio de vos instruments virtuels afin de libérer le processeur de votre bécane. Un surplus de ressources CPU pourrait s’avérer salvateur, sait-on jamais !

Repérage

La dernière étape n’est autre qu’une séance de repérage du morceau. Lancez la lecture et placez au fur et à mesure des marqueurs pour chaque passage important. Une fois que c’est fait, il est conseillé de nommer ces marqueurs de façon claire (Intro, Couplet 1, Refrain 2, Break, etc.). Cela facilitera grandement la navigation au sein du titre.
Enfin, il est judicieux d’effectuer une mise à plat en ajustant rapidement les niveaux et les panoramiques de façon à avoir une écoute confortable de la chanson. Faites-en ensuite un rendu audio et importez-le dans votre projet sur une piste que vous « mutez ». Ainsi, à tout moment lors du mixage, vous pourrez écouter cette mise à plat qui vous rappellera d’où vous êtes parti.

A vos pistes !

Ca y est, vous êtes maintenant prêt à commencer votre mix dans de bonnes conditions. A vrai dire c’est là que la partie compliquée (mais aussi la plus intéressante) commence. Il est clair que l’organisation d’une session n’est pas la chose la plus passionnante à faire. Mais elle vous évitera bien des arrachages de cheveux. Travailler sur une base saine, c’est comme un bureau bien rangé. On s’y sent mieux, on retrouve plus facilement ses affaires, et notre rythme de travail s’en trouve décupler.