Comme toute industrie, celle de la musique réserve parfois bien des surprises, même quand on est le plus grand groupe Pop de tous les temps, en témoigne l’histoire de la compilation Yesterday and Today des Beatles.
Vous vous demandez pourquoi je vous parle d’une compil, de surcroît d’un groupe qui en a des centaines à son catalogue ? Ecoutez plutôt…

En Europe, nous avons découverts les Beatles à travers les mêmes albums, cad que le tracklisting est le même en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France etc. Idem pour les mixages signés George Martin, le producteur des 4 génies de Liverpool…

Mais aux États-Unis, c’était totalement différent. Là-bas, le nombre de morceaux gravés dans le vinyl était moindre, le son un peu différent. Capitol Records, qui distribuait pour l’Amérique les productions des Beatles, se permettait même de mélanger singles exclusivement sortis en 45T avec des titres issus d’albums différents. C’est le cas de la compilation Yesterday and Today, où l’on trouve par exemple Day Tripper et We Can Work It Out qui sont sortis en single, mais surtout des titres issus de trois albums différents, à savoir Help !, Rubber Soul et Revolver, du grand n’importe quoi si l’on enlève la notion de compilation…

Ce mépris des artistes pour répondre à un mercantilisme éhonté ne plaisait évidemment pas à John, Paul, George et Ringo. Quand on leur demande de faire une photo pour illustrer la compilation Yesterday and Today en juin 66, les Beatles se vengent… Ils signent sous la direction du photographe Robert Whitaker l’un des clichés les plus célèbres du quatuor. On les voit portant des blouses blanches de boucher, complètement morts de rire, avec des morceaux de viande et des poupées en morceaux. Complètement psychédélique, il faut dire qu’ils venaient tout juste de découvrir les substances à la mode, notamment le LSD.

Le 20 juin 1966, 750 000 exemplaires sont pressés et prêts à remplir les bacs à disques. Mais avec la « Butcher Cover », du nom que les fans ont donné à cette pochette d’album, vous vous doutez bien que l’Amérique puritaine des années 60 n’allait pas laisser passer une telle insolence.
Ca n’a pas loupé, la pochette fait un tel tollé que Capitol décide illico presto de retirer de la vente les disques et de détruire les pochettes sanguinolentes… L’usine de pressage de Jacksonville s’exécute. Mais pas celles de Los Angeles et de Scranton. Là, on décide juste de coller par-dessus la fameuse couverture une autre avec un visuel bien gentillet comme il faut.
Ces disques ont été vendus et les fans s’amusent depuis à décoller à la vapeur la deuxième photo pour mettre à jour la Butcher Cover. Aujourd’hui, ce vinyl se négocie sur la place de marché Discogs entre 400 et 1 500 dollars. Mais en 2019, un exemplaire dédicacé par les 4 de Liverpool et agrémenté d’un dessin de Lennon s’est adjugé à 208 000 euros…

Yesterday and Today, une compilation mythique des Beatles pour sa pochette pas vraiment vegan, mais surtout une formidable LP_Story_by_RiffX !