Le grand retour de Rover

Il y a trois ans déjà ce géant à la voix cascadeuse avait fait mouche avec son album éponyme. Disque d’or dès ce premier essai, Rover avait taillé sa route dans un nombre impressionnant de concerts, engouffrant un kilométrage dont ce grand voyageur se délectait assurément. Citoyen du monde, homme polyculturel, artiste de talent sans frontières, il revient aujourd’hui avec son deuxième disque Let It Glow. Une réussite.

Timothée Régnier, alias Rover, a déjà une sacrée histoire. Né en France, grandi aux États-Unis, habitant de Beyrouth pendant trois ans (où il a officié aux côtés de son frère dans le groupe The New Government), il s’est vu chassé du Liban du jour au lendemain avec, pour tout bagage, sa brosse à dents et sa guitare. De l’errance qui s’en est suivi, est né le projet solo de Rover avec le succès qu’on lui connaît aujourd’hui. Qualifié de crooner que l’on ne savait classer dans le rock ou la pop, il réussit avec le « Let It Glow » tout juste sorti, à bousculer les certitudes collées à ses basques.

Quelque part entre Christophe et Bowie
Rover oscille toujours entre les frontières des genres et déploie encore des capacités vocales aux envergures époustouflantes. Mais il s’est débarrassé de la démonstration, des ficelles de l’efficacité à toute épreuve. Il s’est déshabillé du clinquant et, force peu commune, apparaît plus nu, plus proche du noyau de l’artiste qu’il est. Alors évidemment les arrangements restent foisonnants et les réverbs très présentes mais, dans leurs conceptions même, les titres s’octroient des libertés de chemins de traverses. Nous promenant tour à tour dans des sentiers romantiques ou psychédéliques, des couleurs célestes ou inquiétantes, les dix titres de « Let It Glow » surprennent et défilent sans faute de mauvais goût. Niché quelque part entre Christophe et Bowie, les seventies et 2010, Rover déploie l’intelligence musicale là ou d’autres auraient filé la facilité. Non, cet homme-là ne se répète pas, il avance, et avec une facilité de vieille âme qui laisse rêveur.

Rover fait briller la musique
Le choix de l’analogique a été pour lui une évidence. La vie, le son, les bruits, les craquements et les oiseaux, Rover a tout pris des défauts/qualités de ce choix. Et c’est décidément très isolé qu’il a peaufiné, écrit, enregistré, comme pour le premier album éponyme où il qualifiait ce retrait de toute vie sociale de nécessité. Le résultat en est cette fois pas seulement réussi. Il va au-delà du simple beau boulot, il mêle tout ce qu’il y a de multi-culturel dans ces deux mètres de bonhomme. « Let It Glow »est désarçonnant, hypnotisant, brut et ciselé. Là où l’éponyme avait laissé un goût de trop sucré au bout des centaines d’écoutes addictives qu’il suscitait, comme une gourmandise punie de son propre péché, ce deuxième album révélera encore des strates de détails, fera découvrir encore des saveurs qui nous avaient échappées. « Let It Glow », laissez le briller dans vos oreilles.

Marjorie Risacher

Découvrir :

Rover – Call My Name

Crédit Photo : © Gassian

Disiz : transe-lucide

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