Rap, urbain, électro : où sont les femmes ? Vol 2. MILEY SERIOUS

RIFFX continue son exploration du féminisme dans la musique urbaine et électro. Aurore Dexmier alias Miley Serious est l’une des rares DJettes françaises à être programmée sur des grands festivals. Rencontre.

 

Miley Cyrus, c’est une fille qui en a. Est-ce que vous aussi ?

J’espère. En tout cas, je regarde droit devant, j’y vais. Je n’ai pas peur.

 

Comment êtes–vous devenue une incontournable de la scène techno française ?

Je  ne sais pas si je suis incontournable, mais en tout cas, j’ai beaucoup travaillé pendant des années, et essayé de jouer le plus possible pour me présenter sur des scènes qui me tenaient à cœur. On m’a offert cette chance plusieurs fois et au fur et à mesure les gens venaient me voir.

 

Quels sont les morceaux incontournables dans vos DJ set ?

Il y a toujours de l’acid techno et de l’acid house à fond ! C’est quelque chose que j’aime énormément. Il y a aussi énormément d’électro de Détroit. Ou des sonorités de Grenoble comme celles de The Hacker et Miss Kittin. Et enfin, ce que l’on va appeler vulgairement de la techno mais avec moi, il y a toujours un peu de ghetto dedans.

 

Vos goûts musicaux sont très éclectiques. Quand vous étiez plus jeune, vous écoutiez beaucoup  de R&B !

C’est normal, c’était les années 2000 et je ne suis pas née avec toutes les connaissances les plus underground. C’était l’époque de Craig David, mon préféré. Aujourd’hui, je suis une très grande fan de Justin Bieber et je ne m’en cache pas du tout !

 

Pourquoi n’y a-t-il pas de DJette star comme David Guetta ou DJ Snake ?

On a Nina Kraviz quand même !

 

Oui bien sûr, mais il y a tout de même un monopole très masculin…

Quand on parle de Guetta ou DJ Snake, on parle de producteurs et non plus de DJ.  Les DJ comme moi ne sont pas amenés à passer sur les grosses radios, ou à devenir des producteurs. Après je ne sais pas pourquoi les programmateurs ne laissent pas beaucoup de place aux filles… Moi, je suis toujours fière de parler de personnes comme Nina Kraviz car en plus d’être connue, elle est iconique.

 

Mais pourquoi moins de filles que de garçons ? Parce que les filles sont arrivées plus tard dans le milieu ?

Pas du tout car les pionniers de la musique électronique étaient des femmes. Miss Kittin était présente dès les années 90. Mais peu de femmes produisent. Est-ce qu’elles ont peur ? Est-ce que sur ce médium-là, nous y allons plus à tâtons ? Peut-être…

 

Pourtant il y a des filles dans le milieu de l’électro !

Pas énormément, mais oui, il y en a. Il y a des filles qui présentent des choses très intéressantes, dans toutes les villes d’Europe et du monde. Avec les cachets que les festivals donnent à certains artistes, ils pourraient booker deux ou trois DJettes. Il faudrait juste que les gens se bougent et soient curieux. Mais l’électronique est un business…

 

Est-ce qu’il a été difficile de vous imposer ? Parce que vous étiez une fille ?

Je ne me suis jamais posée la question. À 17 ans, tout ce que je voulais c’était jouer. A l’époque, il y avait du punk féministe, le « Riot grrrl ». Les filles m’ont montré que je pouvais faire ce que je voulais, quand je voulais. Le féminisme, je l’ai vécu par ce biais-là. Quand j’ai commencé à mixer, je me suis imposée dans le monde de la nuit, sans me poser de questions. Aucune réflexion ne m’aurait arrêtée.

 

Amandine Scherer

 

Rone : Creatures

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