Mai
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Yo La Tengo fait partie des figures à la fois incontournables et discrètes de la scène rock qui donnent l’impression d’avoir toujours été là. Le trio américain est considéré comme l’un des plus importants de la scène indépendante. Même sa durée de vie est impressionnante : 30 ans d’existence l’an prochain. « Fade », fraîchement sorti est leur treizième album !
C’est en 1984 que Ira Kaplan et Georgia Hubley forment Yo La Tengo dans le New-Jersey. Le nom du groupe est la traduction espagnole de « Je l’ai » qui, selon la légende, viendrait d’une anecdote d’un match de baseball de 1962 (le couple étant fan de ce sport). Lui est guitariste-chanteur lead. Elle est batteuse. Après avoir recruté plusieurs musiciens qui sont allés et venus, le bassiste James McNew les rejoint définitivement en 1992.
Mélange des genres
Yo La Tengo est surtout connu pour officier dans un genre – toujours indé – mais très varié. D’une période à l’autre le groupe est passé d’un rock noisy à une pop léchée ou à un folk plus tendre. Aujourd’hui, non contents de briller dans tous les styles, Ira Kaplan, Georgia Hubley et James McNew aiment les mélanger. En témoigne l’album « Fade »,sorti ce mois de janvier. Éclectique et foisonnant, il peut avoir le tort de nous perdre dans des virages pris sans transition. Le titre d’ouverture Ohm résonne comme un hymne communautaire légèrement psychédélique, un peu hippie, avec une touche de trash, dans lequel les voix des membres se mêlent pour entonner « Sometimes the bad guys come out on top/ Sometimes the good guys lose » (« Parfois les méchants réussissent directement / Parfois les gentils perdent »). Les choses sont posées d’emblée : du mélange il va y en avoir et le conventionnel bien pensant n’est pas pour eux.
« Oxygène et clarté »
Au départ plus old school dans le son et les arrangements, l’album laisse un goût très prononcé de pop avant de s’enfoncer plus profondément dans des ballades aux teintes plus actuelles, parfois folk et bienheureuses. Les violons et surtout les cuivres qui s’y mêlent sont une nécessité maîtrisée, apportant oxygène et clarté. Comme la voix de Georgia qui prend la place de son mari de chanteur pour l’impeccable titre Cornelia and Jane, petit écrin délicat posé au milieu de l’album comme une lumière. Toute la seconde partie du disque laisse d’ailleurs un goût de précision et de tendre, de force fragile et de soins raffinés.
Yo La Tengo for ever
Yo La Tengo sait y faire et on n’apprend pas aux vieux singes à grimacer, ni aux musiciens cultes à savoir mener le bal. Malgré leur savoir-faire, « Fade »a le défaut de sa qualité : c’est du Yo La Tengo sans grandes bousculades ni surprises. Aucune déception pourtant, les amateurs jubileront de retrouver le trio avec la classe et les beautés des années passées.
Mais même s’ils ont déjà été plus flamboyants, plus marquants, plus novateurs, Yo La Tengo l’a toujours, cette flamme, cette capacité. Ce talent de tricoter selon l’humeur l’envie, le moment et en dehors des modes. Et surtout peu de groupes pourront se vanter d’avoir une carrière aussi impeccable pendant presque trois décennies. Et pour les trois à venir…
Marjorie Risacher
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