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Anastasis veut dire « résurrection » en grec. Et il s’agit bien de cela. La résurrection d’un duo que l’on croyait appartenir au passé depuis seize ans maintenant. Formation visionnaire et marquante des scènes cold wave, rock indépendant, musiques du monde et même liturgiques, Lisa Gerrard et Brendan Perry sont de retour avec un inattendu 8e album et semblent sous-entendre que cet enfant tardif ne sera pas le dernier.
Elle est australienne et contralto, lui est anglais et baryton. Ils se rencontrent à Melbourne au début des années 1980, forment Dead Can Dance, puis déménagent à Londres. De 1984 à 1996 ils sortent sept albums qui leur conférera une solide réputation dans les milieux indés pour fabriquer une musique non conventionnelle et pourtant ancrée dans le traditionnel, le tribal voire le quasi-religieux.
La glace et le feu
Lisa Gerrard est maîtresse dans son art de la voix, véritable référence en terme de mélopées angéliques et célestes. Repartie en Australie depuis ce que l’on pensait être la fin du groupe, elle a collaboré à de très nombreuses bandes originales de films (Collatéral, Ali ou Gladiator entre autres) et a été invitée sur la production de beaucoup d’artistes (dont le breton Denez Prigent). Multi-culturelle, elle chante en plusieurs langues et a même, depuis l’enfance, inventé la sienne dont elle se sert pour plusieurs titres.
Brendan Perry, quant à lui, a une voix de caverne illuminée par le feu, profonde et chaude. Multi-instrumentiste, il est passionné par les percussions et aime à pousser les limites des instruments traditionnels. L’originalité tient à ce que ces deux-là ne forment pas des duos à proprement parler sur leurs titres. Ils s’alternent au fur et à mesure des pistes, chacun devenant accompagnateur et parfois chœur de l’autre. Mais la grande marque de fabrique de Dead Can Dance ne réside pas uniquement dans un tandem de voix exceptionnelles.
Mélange des genres
Musicalement le groupe défriche tous les terrains et abat toutes les frontières des genres. Mêlant au départ le rock et le classique, ils vont dès leur premier album y introduire l’élément percussif et surtout l’ingrédient mystique. Et, au fur et à mesure des années et des disques, le médiéval, le tribal, le baroque, le religieux vont entrer dans la dance. De longues complaintes extatiques en percussions de tous les coins de la planète, il n’y avait qu’un pas pour réinventer un genre nouveau de musique du monde. Des influences arabes, perses, africaines… tout se mélange chez eux sans se bousculer pour donner un résultat étrange planant et adressé aux ventres autant qu’aux oreilles.
Dead Can Dance seize ans après
Cette fois, il semble que l’élément grec ait été épinglé en plus à leur tableau de chasse aux sons. En y ajoutant les instruments traditionnels, les violons, les synthétiseurs, l’Afrique du Nord, l’Irlande (où Brendan Perry vit à présent), le céleste et le lyrique, on a une bonne idée de ce que contient ce huitième album.
Magnifique, inclassable, mystique, « Anastasis » est pourtant sans surprises réelles et l’on ne sait pas vraiment s’il faut le regretter ou s’en réjouir. Dead Can Dance a fait du Dead Can Dance, l’exact prolongement de ce qu’ils ont été et sont, comme si ces seize ans d’absence n’avaient jamais existé. Mais c’est finalement bien ce qu’ils nous ont appris de la musique depuis le début : elle n’a ni lieu, ni temps.
Alors chapeau bas. Et silence sacré pour cette écoute d’un monde aux dimensions extraordinaires.
Marjorie Risacher
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