DJ Cam : Miami Vice

DJ Cam est un artiste majeur de la musique électronique française. C’est lui qui a jeté les premiers ponts en France entre hip-hop et électro avec par exemple l’album « Underground Vibes ». C’est lui qui a également inventé l’abstract hip-hop « à la française ». Souvent catalogué comme artiste de la french touch, Laurent Daumail serait l’équivalent de DJ Shadow. Discret depuis quelques années, il s’est exilé aux États-Unis d’où il nous envoie cette BO imaginaire inspirée de la série Miami Vice. L’occcasion pour nous de revenir sur sa carrière et sa vision de la musique en 2015 !

« Miami Vice »… C’est quoi ce projet exactement ?
C’est une bande originale d’un film virtuel. J’étais toujours été fan de la série et j’ai habité entre Miami et Paris durant trois ans. J’ai composé de nombreux thèmes différents que l’on retrouve dans les scénarii classiques, comme celui de la poursuite ou de la scène d’amour. C’est aussi un appel du pied aux producteurs qui préparent la suite du premier Miami Vice. J’adorerai bosser sur ce remake. Mes musiques ont été beaucoup utilisées dans le cinéma ou à la télévision mais j’aimerais bien pour une fois composer entièrement la musique d’un film. J’ai même créé une chaîne Youtube où j’utilise des extraits de la série pour poser ma musique.

C’est un véritable exercice de style car chaque morceau est extrêmement différent !
C’est un mélange de tout ce que je sais faire, du hip-hop et de l’électro, mais résolument tourné vers l’avenir car je ne suis pas passéiste. Je ne refais pas pendant vingt ans les mêmes choses. On peut quand même dire que la ligne directrice reste la black music ! C’est vraiment la bande son de ce que tu entends à Miami, avec du gros son dirty-south, ce rap bien lourd et très lent mais aussi les influences haïtiennes : le reggae et le ragga avec ses grosses basses. C’est une carte postale de cette ville avec cette reprise de Phil Collins In the air tonight qui est l’hymne de la série et de la ville !

Quel regard portez-vous sur la scène musicale actuelle ?
Je trouve qu’il y a un vrai retour aux années 1990 en ce moment, et c’est normal car la musique est un cycle permanent. La nouvelle génération s’inspire beaucoup de ce qu’on a pu produire dans ces années-là, pour preuve le rap de Joey Bada$$ ! Je trouve ce retour à la musicalité très bien. On a mangé beaucoup de trucs catastrophiques dans l’électro avec l’EDM. Heureusement, les Daft Punk ont fait beaucoup de bien à cette culture. Vendre des millions d’albums avec un album funk, joué par de vrais musiciens devrait inspirer beaucoup d’autres artistes.

Vous faites parti de cette génération de la french touch qui a cartonné dans les années 1990. Et comme les Daft Punk ou Étienne De Crécy vous revenez sur le devant de la scène…
Moi je suis jamais parti. C’est surtout une question de media ! J’ai toujours produit de la musique et vendu des albums. Il faut se rappeler que l’avant-dernier album des Daft Punk « Human After all » avait reçu un accueil plus que mitigé et puis avec « Random Access Memories », ils sont devenus les nouveaux messies. C’est curieux tout cela… J’ai toujours fait de la musique et certains titres marchent mieux que d’autres dans certains territoires. Je ne me cantonne pas à la France, j’ai toujours réfléchi à l’international.

D’où la ressortie du titre Summer in Paris avec Anggun ?
Oui, c’est un titre emblématique de ma carrière. Je voulais justement proposer à des producteurs de remixer ce titre qui s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires lors de sa sortie, il y a 10 ans. Ce titre est présent sur plus de trois cents compilations dans le monde et je continue encore à le licencier tous les jours ! Il faut savoir qu’Anggun – qui a une image de chanteuse de variétés – en France est une superstar en Asie !

Économiquement parlant, comment voyez-vous l’évolution du marché de la musique ?
Depuis vingt ans je suis auteur, compositeur, producteur et éditeur de ma musique. Je contrôle 100 % de ce que je fais depuis le début de ma carrière. Alors c’est très simple, tu prends les revenus des musiciens dans les années 1990-2000 et tu divises le tout par 100 et tu obtiens la réalité économique du monde de la musique aujourd’hui ! C’est un peu comme si tu entrais dans un magasin de voiture et que tu payais une voiture 100 fois moins cher et que tu puisses repartir avec sans que cela ne choque personne. Cela dit, moi j’ai commencé il y a plus de 20 ans, j’ai un énorme catalogue et j’ai vendu beaucoup d’albums à l’époque… mais je plains les jeunes qui débutent !

Propos recueillis par Willy Richert

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