Music Declares Emergency : le mouvement qui veut rendre verte la filière musicale

 

Initié en 2019 en Angleterre et arrivé en France en 2021, le mouvement Music Declares Emergency (MDE) est un groupement d’artistes et de professionnels de la filière musicale s’engageant pour la transition écologique d’une industrie encore trop dévastatrice pour l’environnement.

“No music on a dead planet” (“Pas de musique sur une planète morte”). C’est par l’intermédiaire de ce slogan univoque que l’organisme de bienfaisance Music Declares Emergency s’est fait connaître au crépuscule des années 2010. En près de 6 ans d’existence, le mouvement, lancé par plusieurs musiciens et exécutifs de l’industrie de la musique anglaise avec le concours de l’organisation à but non lucratif Julie’s Bicycle, s’est arrogé le soutien de milliers d’artistes, de labels ou de professionnels de la filière musicale à travers le monde.

Une force de frappe inédite

Derrière ce message fort porté, dans un premier temps, par des groupes phares de la scène anglaise comme Radiohead, Massive Attack, Jamie XX ou Idles, MDE a rallié à sa cause des stars internationales de tous horizons, comme Billie Eilish, Bon Iver, Major Lazer ou The 1975, venant gonfler la liste des 8228 signataires à ce jour, parmi lesquels se trouvent des labels, des groupements de salles de concerts, des tourneurs ou des associations… Le tout au service d’une double ambition, en s’adressant aussi bien à leur secteur qu’à l’ensemble des industries et des pouvoirs politiques.

D’un côté, le mouvement alerte, éduque et pousse à la transition écologique tous les acteurs de la filière musicale. Un travail d’information, mais aussi d’action, auprès de mastodontes comme les festivals français Solidays, We Love Green ou Rock En Seine ou de l’industrie du disque. Les premiers se sont engagés pour drastiquement réduire leurs émissions de CO2 (en réduisant les transports, la logistique ou la consommation de viande sur place), et la seconde à trouver des moyens moins polluants de produire disques et vinyles.

Récemment, MDE s’est illustré en publiant une compilation pressée sur des vinyles en bioplastique à base de plantes, afin d’offrir un futur décarboné, mais s’est aussi allié au festival pluridisciplinaire gallois Immersed entendant prouver la possibilité d’un événement musical à faibles émissions de CO2.

À l’assaut de la politique

De l’autre côté, si MDE Angleterre a réussi à remporter quelques luttes pour les artistes de la Perfide Albion (le pass Musician Railroad, encourageant les artistes à voyager en train pour leurs tournées), l’organisation souhaite agir plus globalement. Dans une interview accordée à Jack, Mathilde Vohy, cofondatrice de Music Declares Emergency, expliquait : “La musique est à la fois secteur, mais aussi vecteur de transformation. Elle a la capacité à proposer de nouveaux récits et participe ainsi aux constructions identitaires à échelle individuelle et sociétale. Il faut encourager les artistes à inventer un autre avenir, désirable et écoresponsable.”

L’interpellation des gouvernements à agir urgemment sur les émissions de gaz à effet de serre et à remplir son devoir d’information sur l’urgence climatique, ainsi que la lutte contre les inégalités (un facteur aggravant de l’urgence climatique), est au cœur de la charte du mouvement. À ce jour, malgré le soutien d’artistes de renom issus de tous genres musicaux, Music Declares Emergency peine à faire réagir les gouvernements, notamment dans un contexte de climatoscepticisme caractérisant, par exemple, l’administration Trump aux États-Unis.

Mais en encourageant toujours plus les acteurs culturels, notamment les artistes les plus exposés à prendre la parole sur le sujet de l’écologie, à accepter un rôle de modèle et à se faire les porte-voix de cette lutte, le mouvement de MDE pourrait rallier à sa cause des mélomanes de tous âges, empruntant la voie culturelle vers la politisation, qui viendrait gonfler les rangs de cette révolution sociale et écologique.

 

Les Inrockuptibles