Les Femmes à l’honneur : Juliette Armanet

Petite Amie : le nom de son premier album était prémonitoire. Juliette Armanet est devenue l’une de nos chanteuses pop françaises préférées, battant chaud le fer du disco… et nos cœurs par la même occasion.

 

Des basses hypnotiques, un rythme à donner le tournis et ce timbre haut perché qui est le sien. Perché, comme elle ! En effet, dès qu’elle monte sur scène, Juliette Armanet danse, court, saute, joue du piano assise ou debout et scintille au moins autant que la boule à facettes. Une personnalité flamboyante, donc, qui s’est imposée depuis le milieu des années 2010.

À l’époque, Juliette Armanet a un peu joué la comédie, puis a été journaliste dans l’audiovisuel, signant des reportages sur les personnes âgées ou sur la fessée. Déjà, de l’audace ! Il lui en faut plus encore pour se jeter dans le grand bain de la musique. Pourtant, elle a été élevée au sein d’une famille unie et passionnée de culture. Le piano, elle le connaît depuis sa naissance. Sa mère enjoue au quotidien et son père Jean-Pierre est compositeur. Près de Lille, elle grandit en pratiquant le tennis, le patinage artistique et plusieurs instruments. De ses premières amours classique et jazz, de son éducation exigeante, elle garde un perfectionnisme non feint. Puis, de la pop et de la soul qu’elle découvre adolescente, une affection pour les grandes mélodies qui emportent.

Banco, avec L’Amour en solitaire, son premier single absolument irrésistible, elle prouve qu’elle est une solide autrice-compositrice et interprète. L’Indien, À la folie, Alexandre, Manque d’amour… Alignant les tubes, Petite Amie paraît en 2017, avant d’être sacré album révélation de l’année quelques mois plus tard aux Victoires de la musique. Certifié double disque de platine, il se chante encore à tue-tête. Comme les morceaux de Véronique Sanson, pianiste échevelée à laquelle on ne peut s’empêcher de la comparer.
Comme son aînée, Juliette Armanet sait en effet allier les mots à la musique sans besoin de personne. Elle fait tomber les tabous mais évite l’exhibitionnisme. L’amour, elle le revendique sensuel, chaleureux, généreux, pas forcément exclusif, hors des sentiers battus et des discours bêtement hétéronormés. Tout est possible, quand on a du sentiment, quand on veut Brûler le feu, comme l’annonce fièrement son second album, paru en 2021. Juliette y réinvente la notion de romantisme, raconte les coups de foudre, les déceptions, les émois moites et le manque. Bref, une liberté exutoire après des mois de confinement. Surtout lorsqu’on est une pile électrique comme Armanet, qui ne s’en cache pas, pétrie de doutes et d’angoisses, mais certaine d’une chose : sa place est là, dans une industrie pourtant encore sexiste. Son féminisme, elle le porte en couronne depuis ses débuts, et il nourrit chaque vers de ses morceaux, aussi éperdus d’amour soient-ils.

Et le tout en français, s’il vous plaît : si la chanteuse est férue de pop anglo-saxonne, elle reste fidèle à la chanson hexagonale. Autour d’elle, des pointures de l’electro, comme Yuksek ou SebastiAn, qui participent à modeler son air du temps enjoué. Sans occulter la mélancolie qu’Armanet porte en elle. De quoi voir Brûler le feu devenir disque de platine. Et fédérer un public étonnamment large, de tous les âges, et qui, lors de ses concerts en petits clubs ou dans un stade plein à craquer, vient danser (et pleurer) avec elle l’euphorie comme les grandes peines de l’amour. Juliette Armanet, notre petite amie rêvée…